Un chapitre se ferme à la Maison de la prune
MARC LAROUCHE
Après 32 ans d’une production artisanale qui a séduit des générations de gourmands, la Maison de la prune de Saint-André-de-Kamouraska cesse ses activités de transformation. Paul-Louis Martin et sa conjointe Marie de Blois, désormais à un âge vénérable, ont décidé qu’il était temps de ralentir. Cependant, l’avenir n’est pas scellé, puisque la prochaine génération pourrait bien reprendre les rênes dans quelques années.
« C’est le projet d’une vie, mais nous n’avons plus l’âge de ramasser les prunes à quatre pattes », confie avec humour M. Martin, historien de métier, qui a restauré la propriété avec sa famille dans les années 1970. Après avoir découvert un verger oublié de pruniers de Damas derrière leur nouvelle ferme, le couple a décidé de redonner vie à cette culture. À force de patience et de savoir-faire, ils ont replanté et restauré les 1000 arbres qui font aujourd’hui la renommée de l’endroit.
Pendant plus de trois décennies, Mme de Blois a orchestré la transformation des fruits en confitures, gelées, prunes en sirop et paniers cadeaux. « Ce travail demande une énergie que nous n’avons plus, mais il nous a apporté tellement de satisfaction », explique M. Martin. Chaque automne, ce sont entre 7000 et 8000 pots qui sortaient de leur petite production artisanale, un chiffre impressionnant. « Multipliez le tout par 32 », ajoute l’homme.
Le couple a aussi fait rayonner la Maison de la prune au-delà des frontières régionales. À partir de 1994, ils ont rejoint le réseau des économusées, accueillant près de 90 000 visiteurs en quelques années. « Nous avons ouvert nos portes à des gens de partout. C’était enrichissant, mais épuisant », admet M. Martin.
Pour clore ce chapitre, la Maison de la prune ouvrira son magasin une dernière fois lors des fins de semaine du 6 et du 13 décembre, du vendredi au dimanche de 10 h à 17 h. Vous pourrez vous y procurer des prunes en sirop, des gelées, des confitures et des paniers cadeaux.
Un avenir pour la Maison
L’histoire n’est cependant pas terminée. La famille espère transmettre le flambeau à ses enfants, tous deux ancrés dans la région. « Ils ont grandi dans ce projet. Ils ont le savoir-faire et la passion. » Comme entre-temps les prunes continueront à pousser et à tomber, le couple souhaite confier la récolte et la valorisation des prunes à un artisan ou à un transformateur de la région.
« Nous cherchons quelqu’un qui partage notre passion pour ce fruit, et qui saura perpétuer son histoire unique », explique M. Martin, tout en précisant que les prunes Damas, délicates et savoureuses, demandent une attention particulière.
Ce projet de partenariat s’inscrit dans une démarche de continuité pour préserver cet héritage agricole. Les prunes, récoltées au sol lorsqu’elles tombent naturellement, demandent un savoir-faire précis et une logistique bien rodée. Le couple espère trouver un artisan capable de prendre en charge cette étape essentielle pour les prochaines années, tout en respectant l’authenticité et la qualité qui ont fait la renommée de la Maison de
la prune.
Les enfants de la famille vendant des prunes en 1983. Photo : Paul-Louis Martin
Une merveille patrimoniale au cœur du Kamouraska
MARC LAROUCHE
La Maison de la prune, érigée en 1840 par Sifroy Guéret dit Dumont, est bien plus qu’un simple bâtiment. Située à Saint-André-de-Kamouraska, elle est une véritable pièce de l’histoire québécoise, classée parmi les sept merveilles du patrimoine bâti aux côtés de lieux emblématiques comme l’Oratoire Saint-Joseph et La Grande Ferme.
Cette maison de 24 pièces, dotée d’un magasin au sous-sol, a vu naître un vaste verger dans les années 1870, lorsque Sifroy Guéret planta 1000 pruniers de Damas, des pommiers et d’autres arbres fruitiers. Ce verger est devenu un pilier de la région, témoignant de l’ingéniosité et de la vision des premiers habitants de Kamouraska.
En 1974, Paul-Louis Martin et Marie de Blois, passionnés d’histoire et de patrimoine, redonnent vie à cette propriété. « Nous avons découvert un trésor caché. Restaurer le verger et la maison, c’était préserver une part importante de notre héritage culturel », raconte M. Martin.
Grâce à leurs efforts, la Maison de la prune a non seulement retrouvé sa splendeur d’antan, mais elle est devenue un lieu emblématique de la Côte-du-Sud. En intégrant le réseau des économusées en 1994, elle a ouvert ses portes à des milliers de visiteurs, attirés autant par son architecture que par ses produits artisanaux.
Aujourd’hui, bien que les activités de transformation soient suspendues, la Maison de la prune demeure une source d’inspiration. Son classement comme merveille patrimoniale renforce son statut unique, et met en lumière l’importance de préserver les trésors du passé pour les générations futures.
Paul-Louis Martin et Marie de Blois ont donné vie à la Maison de la prune durant 32 ans. Photo : Archives Le Placoteux



